Leroi fournissait aux ouvriers tapissiers les dessins, matières premières, laine, soie, fils d'or et
d'argent,
et leur donnait un traitement qui variait de dix à quinze livres par
mois, suivant leurs aptitudes. Deux maîtres tapissiers, Salomon et
Pierre de Herbaine, frères, chargés de l'inspection quotidienne des
travaux recevaient 240 livres par année ; Jean le Tries, haut lissier :
12 livres dix sous par mois ; Jean le Gouyn, ouvrier de haute lisse,
qui réparait les
tapisseries de l'histoire du Purgatoire d'amours, du roman de la Rose, de Jules César, de Gédéon et d'Alexandre : 10 livres : par mois.
Claude
Baudouyn, le peintre, touchait 20 livres par mois, pour « vaquer à
faire des patrons sur grand papier, suivant certains tableaux, estans
en la grande gallerie dudit lieu, pour servir de patrons à ladite tapisserie. »
Félibien nous donne le nom d'autres peintres qui avaient vaqué tant aux patrons de la tapisserie qu'à d'autres ouvrages de peinture. C'étaient Lucas Romain, Charles Cannoy, Francisque Cachenmis et J-B. Baignequeval.
De
grands artistes italiens, comme le Rosso et le Primatice, apportèrent
un précieux concours à la manufacture naissante, et beaucoup de patrons
de tapisseries n'étaient que la mise en grand de
leurs esquisses : « Comme le Primatice était fort habile à dessiner,
dit Félibien, il fit un si grand nombre de dessins, et avait sous lui
tant d'habiles hommes que, tout d'un coup, il parut en France une
infinité d'ouvrages d'un meilleur goût que ceux qu'on avait vus
auparavant … Il se trouva même des tapisseries du dessin de Primatice. »
Non
seulement Henry II conserva l'établissement fondé à Fontainebleau, dont
il confia la direction à Philibert de l'Orme, mais il fonda aussi une
nouvelle fabrique de tapisseries à l'hôpital de la
Trinité, situé alors près de la rue Saint-Denis. On y entretenait cent
trente-six orphelins dits Enfants bleus, à cause de la couleur de leurs
vêtements ; ils apprenaient à lire, à écrire, puis un métier. Les
artisans du dehors, qui venaient s'y établir, gagnaient la maîtrise, à
la seule condition de montrer leur état aux enfants orphelins, qui
devenaient alors fils de maîtres.
En 1594, un Parisien, nommé Dubourg, enfant de la Trinité, y exécuta les célèbres tapisseries de Saint-Merry. Elles étaient au nombre de douze, ayant chacune 13 pieds de hauteur sur 20 de largeur.
La
dernière existait encore en 1652, mais on juge dans quel état, car on
s'en servait pour boucher les trous faits aux fenêtres par la grêle ou
le vent. Les onze autres étaient en loques ; c'est à peine si on a pu
sauver quelques-uns de ces précieux débris : une tête de saint Pierre,
recueillie par M. Juhinal, qui en a fait don au musée de Cluny, est de
ce nombre.
Les dessins de ces tapisseries, qui sont
de Henry Leramhert, sont conservés à la Bibliothèque nationale, ainsi
que ceux de l'histoire de Mausole et d'Artémise, au nombre de 39, qui
ont fourni une des plus importantes séries de compositions qui aient
été faites pour la tapisserie.
Catherine de
Médicis ordonna la reproduction immédiate de quelques-unes de ces
charmantes compositions, allégorie transparente qui représentait son
histoire sous les traits d'Artémise.
Chaque dessin, du reste, est orné du chiffre de la reine, de son cartel aux armes de France et de Médicis, et de sa devise.
De
1570 à 1660, les ateliers royaux fabriquèrent dix tentures d'Artémise,
quelques-unes de 10 et 15 pièces, en tout, une superficie de 1711
mètres carrés. Sous les règnes de Charles IX, Henry III et Henry IV, on
exécuta plusieurs fois, à Paris et à Tours, une autre composition du
même peintre : les tentures de Coriolan ; l'une d'elles, fabriquée à
Paris, était composée de 17 pièces, mesurant en tout 66 aunes de long
sur 3 aunes 7/8 de haut.
Henry III fit fabriquer, sur les dessins
de Guyot, une tenture de laine et soie, représentant quelques actes
mémorables des rois de France et formant 9 pièces de 32 aunes de cours,
sur 3 aunes 1/4 de haut, La devise du roi était dans la bordure du bas.
En 1544, Catherine de Médicis avait publié un édit établissant à Moulins, en Bourbonnais, une fabrique de tapisseries
; mais il en fut de ce projet comme de la manufacture de Fontainebleau
; qui fut abandonnée pendant les troubles qui signalèrent les règnes
des trois derniers princes de la maison de Valois.
Ce n'est pas
ici le lieu de raconter les luttes que soutinrent de leur côté les
gueux des Pays-Bas pour défendre contre le roi d'Espagne leurs libertés
religieuses et politiques. La correspondance de Philippe II témoigne
assez qu'il n'hésita jamais à recourir aux mesures les plus
rigoureuses,
« dussent-elles entraîner la totale destruction du pays, » pour faire triompher son implacable volonté.
Le
duc d'Albe, le sinistre exécuteur de l'Inquisition d'Espagne, qui, le
15 février 1568, condamna en masse, sauf exceptions nominales, tous les
peuples, ordres et états des Pays-Bas, les déclarant hérétiques,
apostats et criminels de lèse-majesté, les uns pour s'être ouvertement
déclarés contre Dieu et le roi, les autres pour n'avoir pas réprimé les
rebelles.
Le cœur saigne en parcourant le livre des sentences et
les, listes de proscriptions dressées' par le Conseil des troubles, le
tribunal de sang, « el tribunal de la sangre, » comme l'appelaient
eux-mêmes les Espagnols. Les lettres, les sciences et les arts y sont
largement représentés.
Non content d'avoir répandu des torrents de
sang, le lieutenant de Philippe II résolut d'introduire dans les
Pays-Bas le système d'impôts qui était le fléau de l'industrie en
Espagne : li arracha, par la terreur, aux États génèraux un impôt
extraordinaire de la valeur du centième de tous les biens-fonds ; puis
il établit un droit permanent du vingtième sur le prix de vente des
immeubles, et frappa d'un dixième tous les objets mobiliers vendus à
l'intérieur ou exportés.
Cette mesure, qui arrêtait toutes les
transactions commerciales, était surtout destinée à entraver
l'émigration, qui ; malgré cela, prit des proportions immenses. Les
ouvriers, les fabricants flamands, portèrent en Angleterre l'industrie
des tissus, qui avait pendant si longtemps fait la richesse de leur
pays, et repeuplèrent d'anciennes villes ruinées, telles que Worwick,
Colchester, Southampton, etc.
M. Rahlembeck Cite l'exemple suivant
de l'émigration des artistes et des artisans belges au XVIe siècle :
lorsque Marie de Luxembourg, veuve, de Jacques de Romont, épousa
François de Bourbon, duc de Vendôme, et apporta la ville d'Enghien aux
rois de Navarre, Pierre Huart, Vincent Van Geldre, peintres, Jean
Larchier, Adrien de Plukère et Nicolas Provinus, hauts lissiers,
quittèrent la ville en 1567, et, dès l'année suivante, ils en furent
bannis à perpétuité.
Ce que la domination espagnole a détruit ou
fait disparaître d'objets d'art aux Pays-Bas, est incalculable. De leur
côté, les protestants se vengèrent de leur longue oppression sur les
monuments et les emblèmes du culte catholique ; la cathédrale d'Anvers
et une foule d'autres églises furent cruellement dévastées.
Tapis d'Aubusson et Tapisseries d'Aubusson inscrits au Patrimoine de l'Unesco en 2009
Tapisserie d'Aubusson
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